Lassée par les révisions du bac, Fanny surfe sur les réseaux sociaux et tente sa chance pour participer au jeu Ne reviens pas ! Sélectionnée, elle est convoquée avec neuf autres adolescents. On leur masque les yeux avant de les faire monter dans un fourgon et de leur expliquer l’objectif du jeu : rester à l’intérieur d’une forêt isolée le plus longtemps possible, jusqu’à ce qu’il ne reste qu’un seul d’entre eux. Chacun pourra utiliser tous les moyens légaux pour pousser les autres à abandonner. Fanny s’inquiète, il n’y a pas de réseau et seulement neuf kits de survie ont été dissimulés dans la forêt. L’un des concurrents en sera donc dépourvu.
DU MÊME AUTEUR
– Dans la maison
Les jeunes de seize à vingt-quatre ans passent en moyenne trois heures et demie par jour devant leur téléphone. Quasiment une journée entière par semaine connectés au petit terminal digital greffé dans leur main.
Philip Le Roy semble avoir le don d’effrayer les adolescents. Après Dans la maison dans lequel des lycéens s’amusaient le temps d’une soirée à se faire peur jusqu’à des extrémités effrayantes, 1, 2, 3, nous irons au bois reprend les mêmes ingrédients : des adolescents isolés, en quête de sueurs froides et qui bien vite ne contrôlent plus rien. Dans ce nouveau roman sorti tout juste hier, la tension est d’autant plus saisissante grâce au cadre vaste et inquiétant et par tout ce qui pourrait rendre la situation encore plus fatale.
Fanny s’ennuie à devoir réviser son bac de philo et choisit vite de troquer son manuel pour son portable. Sur Instagram, elle tombe sur une intrigante publicité : Ne reviens pas !, une sorte d’escape game dans la forêt. Dix adolescents de dix-huit ans lâchés en pleine forêt avec un sac de survie et leur portable pour filmer leur aventure. Le but : être le dernier à sortir de la forêt avec à la clé 10 000 euros et la possibilité de tourner un film.
Avec des enjeux aussi alléchants, Fanny et des centaines de lycéens n’hésitent pas à envoyer leur candidature pour cette aventure originale. Sélectionnée pour gagner ces fameuses récompenses, Fanny est prête à subir les pièges et farces de l’équipe chargée du jeu. Laissée seule en pleine forêt, elle fait bientôt la connaissance des autres participants. À côté des mésententes et alliances, les jeunes comprennent vite que le jeu connait des failles. La peur sera réelle et leur survie sera bientôt leur première préoccupation.
La peur que Fanny éprouvait en ce moment précis était une « mauvaise peur ». De celles qu’on ne peut pas stopper en détournant le regard. De celles qui divisent les gens et les contaminent. De celles qui chamboulent le corps, prennent l’ascendant sur tout le reste, la soif, la fin, le froid, le sommeil, et conduisent à la mort.
Inquiets suite aux dysfonctionnements apparents du jeu et à la violence de certains candidats, Fanny et ses nouveaux amis tentent de trouver une des issues de cette vaste végétation. Car, lorsque la situation devient claire et que les dangers sont réels, la majorité des adolescents ne souhaitent qu’une chose alors que la nuit commence à tomber : sortir de cet enfer. C’est alors qu’ils comprennent que le piège s’est refermé sur eux. La défaillance de leur équipement est-elle une simple coïncidence ? Ou quelqu’un aurait voulu les piéger ? Mais si oui, pour quelle raison ?
À la recherche de la sortie, les personnages ne sont pas au bout de leurs surprises. Bruits étranges, apparitions effrayantes, objets abandonnés, rien n’est fait pour les mettre en confiance. Philip Le Roy réussit une nouvelle fois à excellemment bien installer une atmosphère inquiétante et étrange et on est à se demander si le surnaturel ne va pas brusquement surgir lui aussi. Fanny, Axel, Hugo et les autres participants ont chacun leur caractère, leur peur, leurs forces, et s’ils ne sont pas les plus attachants, ils créent un front commun intéressant au vu de l’évolution de l’histoire.
On s’inquiète pour eux autant qu’on est soulagés de ne pas être dans la même situation qu’eux. Avec un langage familier propre à l’âge des protagonistes, l’auteur arrive plus facilement à nous installer dans son récit qui est en accord avec ses personnages. Si la toute fin n’est pas des plus étonnantes, tout le cheminement ayant amené à cette conclusion, il est appréciable de découvrir de tels messages de tolérance malgré quelques agissements et chamailleries entre les candidats. Merci à Rageot et à NetGalley, j’ai pris encore un grand plaisir à lire Philip Le Roy.
la peur. Ce sentiment puissant, Fanny pouvait en témoigner, aiguisait l’agressivité de Nadia et la transformait en guerrière. Il poussait Enzo à la violence. Il tétanisait Hugo et renforçait sa subordination. Il creusait le fossé entre Axel et le groupe. Il transformait la jolie Mélanie en victime hurlant et écervelée tout droit sortie d’un film d’horreur. Il baîllonnait Kenji qui en perdait sa personnalité. Et il éprouvait Jordan dans sa vocation de chef. Personnellement, la peur lui faisait perdre son sens de l’humour mais la rendait amoureuse.
Après Dans la maison, j’ai encore plus été convaincue par ce nouveau roman dans lequel l’auteur installe avec talent une atmosphère pleine de tension et de mystères. Les personnages ne sont pas toujours des plus sympathiques mais on les suit avec intérêt dans cette épreuve pour laquelle une issue semble souvent incertaine.
Sortie : juillet 2020
Édition : Rageot
409 pages