Impuissants face à la folie et à la perversité des adultes, Margot et Jeannot peuvent compter sur leur lien télépathique afin de surmonter cette enfance chaotique. Mais pourront-ils se sauver l’un l’autre face au mal absolu ?
DE LA MÊME SAGA
– Blanche Neige
– Peter Pan
– Les 3 p’tits cochons
– Le Joueur de flûte de Hamelin
– Le Petit Chaperon rouge
– Pinocchio
– Le Vilain Petit Canard
– La Petite Sirène
– Raiponce
– La Reine des neiges
– Boucle d’or
– …
Une horrible odeur d’huile rance accompagne la jeune femme au sous-sol. Comme chaque fois qu’elle y descend, elle compte une à une les marches la menant indubitablement vers l’unique appartement miteux qui s’y trouve. Dix marches archi-usées comme autant de gifles lui rappelant sa misérable vie.
Il y a deux ou trois ans, ce roman a connu une grosse polémique, jusqu’à mettre l’auteur et la maison d’édition dans une situation des plus inconfortables. Suite à une plainte d’une lectrice pour “pornographie juvénile”, l’auteur a été arrêté, le livre connaissant pourtant un relatif succès et ayant été sélectionné dans la catégorie “Meilleur roman” pour le Prix Aurora-Boréal. Acquitté en 2020, Yvan Godbout, soutenu par ses éditeurs, réédite son roman que voici. Avant même de commencer cette lecture, on se demande alors ce que l’on va y trouver. Déjà, je vous préviens, comme à mon habitude, que la saga des Contes interdits est faite pour un public averti. Dès la couverture et le résumé d’Hansel et Gretel, vous comprenez bien que cette réécriture de conte ne va pas cibler un jeune public mais bien un public adulte qui n’a pas peur de plonger dans tout ce que l’être humain peut faire de plus horrible.
Il est vrai que ce roman peut rapidement paraître insoutenable, de par ce qu’il raconte mais surtout de par la manière avec laquelle il nous présente les choses. Car, contrairement à d’autres romans de la collection qui en font trop, Hansel et Gretel vise juste, certes dans l’horreur et le morbide, mais Yvan Godbout réussit son pari d’offrir un récit glaçant et déstabilisant. Dès les premières pages, on est plongé dans ce climat d’horreur dans lequel Margot et Jeannot, deux jumeaux, vivent l’enfer à cause de leur beau-père abject. Ouvrant un jour enfin les yeux, leur mère les emmène loin de leur taudis pour fuir le pire. Mais, peut-être n’ont-ils finalement pas encore connu le pire.
En effet, Margot et Jeannot vont devenir les victimes de nouveaux adultes mal intentionnés. Au sein même de la maison de Dieu, les deux enfants découvriront les desseins des adorateurs du diable. Avec un style maitrisé et des effets de style intéressants, Yvan Godbout convainc et rend cette histoire, heureusement ou malheureusement, très immersive. En plein dans l’horreur, on a tout de même le droit à quelques moments plus tendres, à commencer par l’amour indéfectible entre cette mère et ses deux enfants. Des références à plusieurs contes est également bien sympathique.
Néanmoins, si je trouvais que l’auteur réussissait très bien à doser entre le vraisemblable et le morbide, j’ai finalement changé un peu d’avis à la lecture de la seconde moitié du livre. Toute la partie au sein de l’église est particulièrement longue. Connaissant les desseins des nouveaux tortionnaires de Margot et de Jeannot, leur plan aurait pu se mettre en place bien plus rapidement. Et, c’est là qu’on arrive selon moi à trop d’attouchements, de sang, de perversité, je commençais à être un peu blasée. Néanmoins, les deux héros sont attachants et pas seulement à cause de leur mauvaise fortune. Leur lien entre frère et sœur est bien exploré et les nouveaux événements dont ils vont être les victimes ou témoins vont les toucher de manière très différente. On se demande alors si vraiment, Margot et Jeannot seront toujours là l’un pour l’autre ou si finalement, ils vont devoir choisir un chemin différent, ce qui amènerait à plus d’une conséquence désastreuse.
En définitive, Yvan Godbout ne fait pas l’apologie du viol ou de la pédopornographie. Justement, il a fait le choix, comme d’autres de ses confrères et consœurs au sein de la saga, de taper le plus fort possible en provoquant le dégoût. Rien ne nous est épargné, comme aux victimes, et on n’a pas la possibilité de détourner les yeux. C’est un choix que l’on peut ne pas apprécier mais je ne vois pas comment on peut croire qu’Yvan Godbout propose librement des passages de pornographie juvénile. Tout est fait pour choquer et pour montrer toute l’horreur de ces sévices.
Une fraction de seconde pour que le garçon ouvre les yeux, totalement paniqué. Une fraction de seconde pour que l’enfant comprenne qu’il ne s’agit pas d’un rêve, mais d’un cauchemar bien réel. Son méchant papa fait du mal à sa gentille maman. Non, en fait son abominable père va tuer sa mère et s’occupera ensuite de Margot. À la toute fin viendra son tour à lui. Il doit arrêter ça. Lui, le petit garçon qui suce toujours son pouce , la nuit. Lui que sa maman appelle son petit poucet. Il doit mettre un terme au cauchemar éveillé.
C’est l’un des contes les mieux écrits dans ceux que j’ai lu pour le moment, l’auteur nous plonge immédiatement dans cette atmosphère acre, sale et violente dans laquelle nos deux jeunes héros perdent bien vite toute leur innocence. La deuxième partie m’a moins convaincue, trop longue et finalement un peu trop dans la surenchère malsaine.
Sortie : octobre 2017
Édition : AdA
253 pages
Ouh là là. Pas sûre d’avoir envie de le lire. On doit en ressortir assez perturbé…
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Oui, un peu beaucoup 😆 On sait dans quoi on se lance, ce n’est pas une lecture facile.
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Je salue l’initiative mais je ne suis pas le public pour ce genre de littérature. J’avais tenté Sade par curiosité mais j’ai eu beaucoup de mal et ça a l’air pareil… 😅
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La différence est que Sade prenait plaisir à écrire des horreurs qui alimentaient ses propres fantasmes et ça se ressent à la lecture.
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Tu as tout à fait raison pour Sade et heureusement qu’on n’a plus ça V.V
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Oui heureusement !
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Pas certain que je sois le public visé mais pourquoi pas, il y a bien énormément de dark romance plébiscitées par les lecteurs.
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Alors, attention, ça n’a rien à voir avec de la dark romance. C’est vraiment de l’horreur psychologique, qui n’est pas romantisée (et heureusement !)
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Certes mais je voulais surtout faire le parallèle entre ce qui est reproché à l’auteur alors que d’autres écrivent sur d’autres sujets tout autant malaisants voir malsains.
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Ah oui, à ce sujet, c’est vrai que c’est hypocrite. Il y a beaucoup de livres qui jouent sur ce tableau, ou sur celui des relations toxiques à leur summum, sans prévenir le lecteur de ce qu’il va avoir et sans se faire taper sur les doigts.
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Je suis bien tentée par cette collection qui revisite de manière horrifique les contes d’enfants mais peut-être pas par celui-ci qui me semble trop malsain…
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Il y en a beaucoup qui le sont, même si d’autres sont effectivement plus « soft » parce qu’ils ne parlent pas de violence contre les enfants (Le Petit Chaperon Rouge, Le Vilain Petit Canard, Pinocchio,…)
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J’avoue ne pas avoir adhéré aux autres titres…. Ca provoque effectivement trop de dégoût avec des sévices qui sonnent tellement réels… Trop dur psychologiquement.^^’ Mais ravie que tu aies aimé et que, malgré tout le débat qu’il y a eu autour de ce titre, l’auteur traite son sujet avec brio.
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C’est clair qu’il faut avoir le cœur bien accroché avec cette collection. En ce qui concerne l’effet de réel, cet auteur réussit très bien à le travailler dans son livre, c’est ce qui en rebutera beaucoup malgré ses qualités.
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